Comment limiter individuellement notre impact sur l’environnement? En pratiquant les éco gestes en voilier.
Le mer fait un magnifique terrain de jeu aux marins et aux amateurs de sports nautiques. L’aimer, la respecter, c’est faire son possible, à notre microscopique niveau, pour la préserver.
Après notre article sur la croisière durable, s’adressant plus particulièrement aux propriétaires de bateaux, nous avons rédigé cet article, s’adressant à tous, pour tenter d’apporter des éléments de réponse à cette question préoccupante.
L’état des lieux
Fonte des glaciers, élévation du niveau de la mer, retrait des traits de côte, acidification des eaux, modifications des grands courants océaniques, le réchauffement climatique découlant des activités humaines entraîne de lourdes conséquences sur l’état des océans.
Diminution de la biodiversité, disparitions ou développements invasifs d’espèces, augmentation des épisodes météorologiques violents, pollution des côtes et des eaux, urbanisation du littoral, les conséquences de l’activité humaine sur les océans sont bien là, sous nos yeux.
Agir ou ne pas agir ?
Devant une telle situation dont on suit l’évolution, revenant d’années en année sur les mêmes rivages de plus en plus abîmés, on peut adopter deux attitudes.
On peut s’en ficher en pensant que “la nature sera la plus forte” ou qu’on sera mort avant que la situation ne devienne vraiment catastrophique ou encore se peindre les lunettes et s’auto-suggérer que les choses ne sont pas si noires…
Mais comment regarder alors les enfants en face si on n’adopte pas, à notre tout petit niveau, quelques comportements salutaires, quelques actes à notre portée ?
La somme des petits gestes emporte souvent de fortes conséquences.
Alors, si on souhaite que la mer demeure cet espace apaisant de nature et de liberté, agissons, maintenant, à notre niveau, et limitons au maximum notre impact sur l’environnement et sur la Grande Bleue.
Nous avons identifié quatre grands axes, individuellement à la portée des plaisanciers co-navigateurs, quatre axes sur lesquels il est facile d’agir.
1. Les éco gestes en voilier pour diminuer notre impact en production de CO2
Les transports représentent 41% des émissions de CO2 à l’échelle de la France.
Ces émissions sont très différente selon le mode de transport choisi. Prenons un exemple : Pour une personne seule, un trajet de 500 km va émettre 1 kg de CO2 en train, 60 kg en voiture et 100 kg en avion.
- Éliminez l’avion pour vos trajets court et moyen courrier !
Le gain net en temps du transport aérien court-courrier n’est pas si évident (délais, pré-acheminement, post-acheminement) et le train offre un second avantage (lorsque la SNCF n’est pas en grève), le voyage et le dépaysement commencent une fois le pied posé dans le wagon !
- Si vous devez utiliser une voiture, groupez-vous!
Embarquez des passagers supplémentaires avec Blablacar ou des systèmes d’autopartage de ce type et évitez le véhicule de deux tonnes…
- Choisissez des produits issus des filières locales
Quand vous ferez vos courses, il n’y a aucun intérêt à voyager en train si vos avocats, vos fruits exotiques, vos petits pois ou votre viande ont rejoint le pays en avion.
- Une fois à bord, oubliez le plan d’escales
Puis, lorsque la croisière a commencé, lâchez prise sur la destination et concentrez-vous sur le voyage en tant que tel. Il ne s’agit pas de se rendre à un point B mais de profiter du trajet. Le plan d’escales ne revêt aucun caractère obligatoire et se laisser porter par le vent c’est tout l’objet de la croisière à la voile.
- On prend le temps de naviguer à la voile
Plus de navigation à la voile c’est moins de navigation au moteur, et les moteurs diesel des voiliers ne disposent ni de vannes EGR ni de pots catalytiques… Ce sont les moteurs des voitures d’il y a trente ans !
2. Les éco gestes en voilier pour diminuer notre pollution en plastiques et micro-plastiques
Pollution particulièrement insidieuse, la pollution plastique est protéiforme.
L’immense majorité des objets de consommation fabriqués en matière plastique n’est pas économiquement recyclable. Si certains pays investissent dans de coûteuses filières de recyclage, d’autres pays ne disposent pas de telles ressources.
Les plastiques finissent alors brûlés, enterrés dans les cas où ils ont pu être collectés ou se retrouvent dans l’environnement pour les autres.
Près de 50% de l’humanité vit sur la bande côtière, les déchets non collectés accumulés dans l’environnement se retrouvent, à la merci des pluies, dans les cours d’eau puis de là, dans les mers et les océans…
- Evitez au maximum emballages et suremballages
On peut agir en amont de la croisière en portant une attention sur les contenants et les emballages des subsistances que l’on va acheter. On peut éviter au maximum emballages et suremballages, tout particulièrement si la zone de navigation, et de débarquement probable des déchets, ne compte pas de filière de recyclage.
Une fois à l’eau, les objets de grande taille vont mettre des années à se dégrader, présentant un danger pour les mammifères marins et causer une affreuse pollution visuelle.
- Evitez au maximum les micros plastiques
Lorsque le procédé de dégradation les aura réduits en plus petits morceaux, petit à petit, ces macro-déchets vont entrer dans la catégorie des microplastiques. Ces horreurs, de moins d’un millimètre de diamètre à quelques microns, sont également présentes dans une foule de produits du quotidien. Micro-billes des dentifrices, paillettes des vernis à ongle, filtres des crèmes solaires, mais aussi résidus d’abrasion des éponges sur la vaisselle synthétique ou encore résidus des lessives des tissus synthétiques.
A nous de décider si nous avons vraiment besoin d’un vernis pailletté ou de microbilles pour retrouver une haleine fraîche ! Des alternatives, souvent bien antérieures aux produits polluants issus de la chimie du pétrole, existent et ont fait leur preuve.
- Privilégiez des textiles techniques de voile en polyester recyclé
Les textiles dits “techniques” de voile sont tous réalisés en matière synthétique issus de la chimie du pétrole. On peut choisir des produits réalisés à base de matières plastiques recyclées. Chez Patagonia, 90% du polyester utilisé est recyclé. Les marques bateau s’y mettent petit à petit.
- Privilégiez votre vieux pull marin en laine!
Mais pourquoi ne pas privilégier les fibres naturelles ? Qui n’a pas un pull en laine épais ? Dans le monde des vêtements techniques, on parle de seconde couche de type polaire, mais un bon gros pull en laine possède de nombreux avantages. Il reste tiède quand il est humide, il ne produit que des déchets organiques biodégradables, et vous l’avez déjà probablement au fond de votre armoire !
- Evitez l’eau en bouteille
L’eau potable constitue un dernier levier d’action. Il y a un vrai paradoxe avec la gestion de l’eau potable à bord. On navigue sur l’eau, on a des réserves remplis d’eau douce, parfois un dessalinisateur mais on ne boit que de l’eau en bouteille (et du vin rouge) ! Des quantités énormes d’eau en bouteille !
Ces dizaines de bouteilles peuvent être recyclées mais cette filière consomme des ressources, des espaces, alors pourquoi ne pas éviter la corvée des packs d’eau ?
Si le bateau n’est pas équipé d’un filtre, rien ne vous empêche de vous munir d’un modèle de randonnée, comme ceux, excellents, fabriqués par la société suisse Katadyn.
30 secondes d’action sur un levier vous délivre 2 litres d’eau potable provenant de n’importe quelle source d’eau polluée ou de qualité indéterminée. Un filtre de genre vaut une centaine d’euros et est capable de délivrer 1000 L d’eau potable. Ces filtres sont parfaits pour potabiliser l’eau des réservoirs avant de la transvaser dans une gourde ou une bouteille durable.
3. Les éco gestes en voilier : remettre le critère de la durabilité au premier rang dans vos choix
Il y a deux générations encore, la durabilité comptait parmi les tous premiers critères de choix des biens de consommation. Les objets, souvent coûteux mais soigneusement manufacturés, duraient longtemps et si tel n’était pas le cas, les consommateurs s’en détournaient.
Aujourd’hui, observez votre sac de voile et son contenu. Quels sont les objets que vous pourrez toujours utiliser dans 5 ou dix années ? A cet horizon, le sac lui-même sera probablement réduit à l’état de charpie et son contenu, impossible à réparer, aura rejoint, dans le meilleur des cas, la déchetterie.
Où sont passés les coffres, les cirés et les bottes des marins d’antan, des objets, réparables à l’infini ou presque, qui ne venaient pas s’échouer sur les plages de nos ancêtres ?
Ils sont remplacés par ceux d’une d’une fast-mode, sans cesse renouvelée, ou seul compte l’aspect extérieur et l’attrait immédiat mais rarement la durabilité.
- Choisissez des vêtements et des objets qui vous semblent durables. Acceptez d’en payer le prix et conservez les longtemps.
- Suivez les efforts environnementaux des marques dans ce domaine et apportez votre clientèle à ceux qui vous semblent les plus vertueux.
4. Les éco gestes en voilier pour éviter les rejets d’eaux polluées
Contrairement aux idées reçues, les eaux noires (les toilettes) ne sont pas les plus néfastes pour l’environnement. Évidemment, leur concentration dans les eaux peu profondes des mouillages est désagréable à imaginer, mais des cuves à eaux noires sont désormais obligatoires à bord.
Le cas des eaux grises (douches et vaisselle) est plus délicat.
Aucune réglementation n’interdit leur rejet en mer, quelle que soit la distance des côtes. A terre, des filières d’épuration sont installées mais il n’en est rien en mer.
Ces eaux recèlent de nombreux polluants. Lors des douches, les composants chimiques et microplastiques des gels douches rejoignent, à la mer, celle des dentifrices et des crèmes solaires. Les savons sont porteurs de colorants, agents d’odeur ou de texture, nocifs pour la faune et la flore marine.
On peut et on doit agir de deux manières :
- Favorisez les douches à terre, quand c’est possible
- Choisir avec soin ses produits d’hygiène et d’entretien pour des versions les plus dénuées de produits toxiques possibles. Le savon noir fait un excellent liquide vaisselle et le savon de marseille un produit d’hygiène très efficace.
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